Jurez de dire la vérité toute le vérité rien que la vérité autant que vous le pouvez. Levez la main droite et dites : je le jure.
Je le jure.
Doit on connaitre le mensonge pour dire la vérité?
Je ne crois pas qu’il y ait un partage bien net entre le mensonge et la vérité. Sauf peut-être dans le domaine judiciaire ou policier. Mais même dans ce cas, la culpabilité ou l’innocence de celui qui dit, sont assignées, qu’il s’agisse d’un crime, d’un délit, d’une complicité, au moyen, ou au milieu d’une procédure qui est faite de papiers, de signatures, de preuves, de protocoles et de rituels, de toute une construction qui s’apparente à un récit et qui contient des éléments de mise en scène. Comme par ailleurs, tout récit, littéraire, toute dramaturgie ou mise en scène engagent quelque chose de l’ordre de l’aveu, de la reconstitution des faits, répondant en cela à la question : qu’est-ce qu’il s’est passé?
Et puis, d’une façon générale, il n’y a pas d’aveu ou de démenti judiciaire qui se fasse hors du langage. Le mensonge et la vérité sont des catégories du langage, des attributs de l’énoncé. Mais ils lui sont postérieurs, ils sont un sort fait au langage, que l’on somme de se situer en fonction du partage du mensonge et de la vérité. Cela, afin d’identifier le sujet qui parle. Mais le langage en lui-même est indifférent à ce partage. Il peut s’y soumettre, y être contraint, et celui qui parle avec. La vérité est alors la sentence donnée par l’institution à celui qui a dit. La vérité est une institution, elle est normative et disciplinaire. Sa finalité est la sujétion du sujet.
Le langage en lui-même ne contient pas ce partage, il est forme, rythme, ton, couleur, et il n’y a rien à dire qui puisse être dit sans langage, donc rien ne peut-être dit hors du langage. Contrairement à la formule de Wittgenstein qui termine le Tractacus logico-philsophicus, qui est en fait un traité d’humour viennois : il n’y a rien à taire, Il n’y a pas d’innommable, pas d’indicible. Rien ne peut pas être dit. Rien hors du langage. Et le langage lui-même est une forme concrète qui articule lumière et ombre, rythme, temps, et qui n’a que ça pour tout dire. Il n’y a pas de pure expression instantanée de tout. Donc il n’y a pas de vérité. Il n’y a pas non plus de mensonge. Il n’y a rien de pur. D’où la nécessité de l’invention infiniment renouvelée de formes, le ruissellement d’images nouvelles pour arriver à dire ce qu’il y a à dire. L’invention, son immortalité, l’inventivité de la vie vient de ce que ce qui a été dit dans une forme est déjà dit. Et tout ce qu’il y à dire est infini, il est le temps. D’où la musique, forme supérieure de la vie. Veut-on faire dire la vérité à une flûte enchantée? Une flûte charmante ment elle? Un pipeau? La musique est la vie libérée, dans le sens où elle est le langage le plus affranchi de l’artifice le plus réussi qu’est le partage du mensonge de la vérité. D’une façon générale, l’art commence là où le langage s’est affranchi de ce partage, et c’est dans la musique qu’il va le plus loin, sans doute, et à ma connaissance, jamais plus loin encore que dans » l’air de chérubin « des Noces de Figaro.
La perception de la réalité est elle même gouvernée, et c’est sans doute pour le mieux, pour la bonne gouvernance de la vie de chacun, par ce partage du mensonge et de la vérité : Ainsi, telle rue s’appelle ainsi, elle ne s’appelle pas comme ça, si tu te trompes, tu vas te perdre, etc… Mais parvenu à un point d’abolition de ce partage, alors la fiction et la réalité se confondent, le théâtre et la vie, chaque signe devient signe d’un autre jusqu’au plus profond de la conscience dans une sorte d’enfoncement infini, de traversée vertigineuse, dangereuse et exaltante des apparences qui se recouvrent les unes les autres. Mais ça, c’est la grande fête.
Est-il préférable de la connaitre, la vérité?
Alors, puisque tu poses quand même la question. Au plan de ce qu’on appelle le réel, avant de tomber comme Alice dans le puits des paradoxes du neverland, avant de voir le lapin qui court après son train, il faut quand même avoir été un peu sincère avec soi-même, car le puits est au fond de soi, au fond d’un soi sobre. Non pas un soi mis en péril superficiellement par des drogues achetée en pharmacie ou dans la rue. Le puit ou le terrier du lapin, sa garenne sont à l’intérieur de soi : pour en trouver l’entrée, il faut sans doute s’engager dans un cheminement qui à voir avec la vérité, ou en tout cas se dégager des subterfuges de la conscience qui se plaît à se voir dans un miroir plaisant. C’est là le miroir qu’il faut traverser, pour reprendre encore le chemin de la jeune fille, Alice. Car ce miroir, c’est ce que les bouddhistes encore appellent je crois le voile de Maya, il est fait à mon sens de toutes les idées que je me fais de moi. Il ne faut plus du tout avoir d’idée de soi pour aller là où va Alice. Pour traverser le miroir, il faut se regarder, tel qu’on ne voudrait jamais se voir. Ainsi on se voit, parfois, mais seul, et on en souffre, d’être pareil à tous, et absolument, on s’efforce de se voiler, et d’apparaître aux autres. Même souvent dans la plus apparente et scandaleuse provocation il y a une immense soumission.
Mais c’est dangereux d’aller de l’autre côté du miroir. En cela le miroir est aussi nécessaire à la santé, l’idéal est de ne pas perdre de vue que le miroir est une illusion.
Don Juan était un soumis je pense.
Et puis il y a la vérité du sentiment. Là encore l’air de Chérubin est, je crois un maximum. L’opposé de Don Juan. Mais elle n’est pas une vérité.
Votre mémoire est-elle à vous?
Dans la mesure où de plus en plus la mémoire est le fait des « computer », et quand on sait que la mémoire des « computer » est stockée dans de grands frigos où des robots sélectionnent la mémoire utile aux gouvernements civils ou privés, préfigurant en cela de manière avancée l’accomplissement de la prophétie du film Matrix, je dirais : non.
Mais il s’agit là de mémoire artificielle, qui est différente de la mémoire créatrice et dynamique. Cette mémoire là, qui est la mienne car, que je le veuille ou non, je ne peux pas m’en défaire, elle est plus moi que moi. Il est, je crois, dans le cours des choses, quand on regarde la mémoire, de voir la mer, les grandes eaux, dont la surface peut-être calme, plate, transparente, agitée, tumultueuse, tempétueuse, catastrophique et dans le fond est toujours plus large et profonde, et toujours plus sombre et froid. Et je crois qu’au fond de ma mémoire il y a les poissons. Une baleine plus que tout autre, qui n’est pas un poisson. Il me semble. Il y a, bien sûr, la mémoire de mon enfance, celle de ma mère, de mon père de leur mère, de leur père, et des aïeuls, la mémoire de la race, des races, de leurs affrontements, de leurs traversées, leurs migrations, leurs supplices et leurs disparitions. Tout ça encore enveloppé dans le langage que je parle, et qui est la vie de ma chair, la vie de ma chair, une étoffe épaisse et infiniment enveloppée sur elle-même, pliée un nombre innombrable de fois. D’où on peut, non pas aisément, mais il n’y a rien d’impossible, connaître, pressentir profondément un grand nombre de langues, même mortes. Bien des danseurs savent aussi, et je crois qu’on fait beaucoup d’anatomie animale dans les écoles de danses, qu’il y a, enveloppées dans la chair vivante humaine des possibilités oubliées, ou surmontées, des animaux que nous sommes aussi. Ainsi tel geste de danse, sera pris à un cerf, à un singe, à un tigre, à un serpent. Il y a ça aussi, développé à un très haut point, dans les arts martiaux orientaux.
L’amour est-il le contraire de la haine?
Oh, je ne crois pas. L’amour contient bien des choses qui ne sont pas lui. Il suffit en cela de lire Le Banquet de Platon. Puis évidemment la psychanalyse, mais même sans ça. Il suffit là encore, et il faut surtout, regarder à l’intérieur de soi. De toute façon, il n’y a de connaissance qu’à l’intérieur de soi. Les livres peuvent servir à conduire à l’intérieur de soi, si tant est qu’ils sont le produit de quelqu’un qui est allé chercher à l’intérieur de lui même. Le livre est en ce sens seulement un moyen de connaissance, au sens véritable, et donc d’amour. L’amour, donc absolument est le contraire de la haine. Mais cet amour là, reste à définir. Dans la façon dont les gens s’aiment quotidiennement, il y a bien de la violence, bien de la tristesse, bien de la haine.
Je pense que l’amour est le champs politique majeur. Le plus difficile. Parce qu’il est considérablement intérieur, et suppose une connaissance supérieure, un engagement intégral de soi dans l’action. De l’esprit, du coeur, du sexe. La communauté politique supérieure est une communauté d’amour, ou une communauté d’amants.
Et c’est je pense parce que l’amour est le champ politique majeur que nombreuses formations politiques révolutionnaires l’interdisent dans leurs rangs. Un groupe politique qui exclut seulement la considération de l’amour en tant que champ de l’action est voué à devenir une opération de mort. Et ce sont surtout les femmes qui les premières en souffrent, et les homos, bien sûrs.
D’où le centralité du champ du genre dans l’espace politique révolutionnaire contemporain. Qui est dans la clandestinité souvent posé en posture, et au gouvernement socialiste posé après avoir été vidé de sa puissance (la parité etc…). La question du genre ne se pose que dans les zones révolutionnaires. Elle est centrale au sein des minorités, elle est imminente, de façon grave et non-consciente dans les communautés marginalisées. Chez les jeunes intellectuels anarchistes qui ont lu mille fois Foucault et Butler, elle est un positionnement théorique, mais ils n’en éprouvent pas l’urgence dans leur sexe et dans leur coeur, il me semble. A quelques exceptions près.
Je crois qu’il n’y a pas de plus grande puissance que la puissance d’aimer. L’amour est à réinventer, et sa réinvention engage dans le plus terrible des affrontements politiques. La soi-disant « libération sexuelle », qui n’a jamais eu lieu, est en fait le chaos qui reste après l’effondrement des formes antérieures de l’amour.. Mais loin qu’il en soit sortis des individus libres, les hommes et les femmes errent comme des zombies qui baisent et se séparent et retournent à leur triste solitude. C’est peut-être sur cette désertification de l’amour, sur cette morbidité de la sentimentalité contemporaine que reprennent les formes mortes de l’amour antérieur : la maman et la putain, en somme. La manif pour tous.
La liberté existe t-elle?
La liberté n’existe pas en-dehors de celui qui l’éprouve, et surtout peut-être de celui qui éprouve qu’il en privé. La liberté n’existe que dans le rapport au pouvoir. Il y a un cynisme de tout ceux, et beaucoup dans le milieu artistico-culturel, qui semblent ne pas savoir s’ils sont libres, et semblent surtout s’ennuyer de leur liberté formelle, la liberté du citoyen. Sans doute ils ne sont pas contraints. Et sans doute aussi, leur formalisme citoyen, et leur cynisme, est l’instrument de la contrainte qu’ils exercent sur d’autres. Le pull que porte l’artiste cynique, le carnet sur lequel il gribouille ses dessins branchés, ont été fabriqués par une jeune fille srilankaise morte dans l’effondrement de l’immeuble-usine où elle travaillait. La liberté existe là où la force existe, en tant que sentiment de vie, la joie lui est associée, nul ne se sent libre sans force et joie, sans briser des chaînes. La liberté est un état, la libération est le mouvement qui y conduit. La liberté est aussi indissociable du courage. Donc la force et la joie. Mais le courage d’abord. Il n’a pas d’homme ou de femme libres qui ne soient courageux. C’est ça au fond je crois, surtout, les courageux sont libres, les lâches ne le sont pas. Sans doute le cynique, qui est considérablement majoritaire, est celui qui ne changerait pour rien au monde sa petite vie lâche qui le garde en sécurité. C’est celui qui se soumet, et se range sous le maître à qui il donne raison, parce que le maître a raison. Le cynique a du bon sens. L’homme libre est celui à qui la joie et le courage, l’amour de la vie font préférer la mort à la servitude. Le lâche n’a pas nécessairement plus conscience de la servitude que la liberté. C’est pour ça que la question au fond ne se pose que pour les lâches.
Êtes-vous libre?
Je tâche chaque jour de m’approcher avec le plus grand nombre d’amis possibles de la liberté. Il m’arrive chaque jour d’être lâche.
Le destin des pauvres se joue t-il autrement que le destin des riches?
Le destin ne se joue pas seul. Il se joue dés lors qu’il y a un joueur. Ceux qui ne jouent pas perpétuent l’illusion qu’ils prennent pour la réalité. Alors les illusoires riches resteront riches et les illusoires pauvres resteront pauvres. Je n’envie pas plus le riche que le pauvre, bien que d’expérience j’ai vu que les gens qu’on dit pauvres sont plus heureux et drôles que les riches. Mais le bienheureux est celui qui est lancé dans la destruction de l’injustice sociale, qu’il soit riche ou pauvre, il s’affranchira des catégories sociales. Seul celui-là a un destin. Il y un misérable snobisme lâche et cynique chez les artistes et dans le monde culturel de quelques uns qui ont un peu lu Georges Bataille, et Nietzsche, et qui en parlent beaucoup, mais qui ne parlent que de ça, comme des vieilles femmes parlent de leur coiffure, ou de leur chien, et qui trouvent bien qu’il y ait des riches et des pauvres. Ce sont des asservis. Tout le contraire de Nietzsche. Bataille, je sais moins. Je m’en fous un peu, à vrai dire.
Le destin est la rencontre de l’instant et de l’éternité. C’est le coup de foudre du particulier et de l’universel. Il arrive que cette rencontre ait lieu dans le cœur d’un homme. Celui-là n’est ni riche ni pauvre. Il est en route vers l’accomplissement de l’universalité en lui de la femme et de l’homme.
Pensez-vous que nous avons chacun, un destin?
Non, on n’a pas un destin comme on a une paire de jambe. Les cyniques n’ont pas de destin.
La magie est-elle une illusion?
La magie est l’état décrit plus haut, d’enfoncement dans les apparences sans fond, qui suit l’affranchissement du partage de la vérité et du mensonge. Dans cet état il n’y a que l’illusion donc il n’y en a plus. L’art est le monde rendu à l’illusion.
Je ne vois pas ce que pourrait être la musique de Mozart sinon le monde-magie.
Sommes nous profonds?
Étant donné ce qui précède : oui, tous. Mais peu veulent atteindre leur profondeur. La profondeur est le domaine du sentiment.
Le soleil est-il au fond de l’univers?
L’univers n’a pas de fond
Les idées sont-elles des étoiles?
Le domaine de l’esprit a beaucoup à voir sans doute avec le cosmos. D’où qu’on peut découvrir des étoiles à la seule force de l’esprit.
D’où vient ton désir?
Probablement du cosmos.
La jouissance est-elle dangereuse?
Pas plus qu’un bon repas. Mais moins que l’appétit.
On ne trouve jamais l’autre que dans soi-même?
Non, on ne trouve qu’un autre en soi-même. Et il faut surtout sortir de soi pour trouver un autre. Sortir de soi est dangereux. Rester en soi ne l’est pas.
Ou on ne se trouve soi-même que dans l’autre?
Je ne crois pas non plus. Il faut se libérer de soi, devenir un autre, on ne devient jamais l’autre. On devient un autre avec l’autre. Il ne faut jamais cesser de se transformer.
Être humain, est-ce possible?
Biologiquement, c’est fatal. Moralement aussi, pour le meilleur et le pire. Mais l’humanité est pleine de possibilités encore inouïes, pleine de promesses, annoncées à des instants de l’histoire, endormies, mais gardant dans leur sommeil un rêve qui est le revers de l’histoire dans quoi à tout moment l’humanité est capable de se renverser.
Une vie peut-elle transformer le monde?
Oui, à condition qu’elle se transforme elle-même.
La mort est-elle l’ennemie de la vie?
La mort n’a rien à voir avec la vie.
Son contraire?
La mort n’existe pas. Seuls les cadavres. Et pourtant elle remplirait la vie de son néant presque jusque la suffocation. A tel point que c’est de ce suffocant néant que viendraient les masques, l’Histoire ? Tout cela ne serait qu’une stèle, un cimetière ? Nous le croyions autrefois… D’une croyance si puissante, presque aussi vive que l’emprunte de la baleine dans mon dos, que même mon vêtement est taillé avec l’idée qu’il empêchera ou forcera le retour d’un mort.
Un mal peut-il être délicieux?
Par principe tout délice est un mal. Prenez l’éclair au chocolat… Ou plus virilement, le gras du magret dans le canard…
Es-tu un homme bon (une femme bonne)?
Étant su de ceux qui me connaissent que je cède difficilement à la gourmandise. Je crois faire preuve d’un effort vers la bonté.
Penses-tu qu’on s’arrange avec le mal?
Je ne sais pas qui est « on ». En ce qui me concerne : Le mal, ou disons : la puissance de destruction intrinsèque à tout mouvement doit être l’objet d’une considération sérieuse, et d’une éthique. Il ne s’agit pas d’un arrangement. Mais d’un combat. En cela rien je crois n’est allé plus loin que l’art de la guerre chinois. Pas d’éthique, à ma connaissance, plus savante que le Kung Fu et ses très nombreuses sous-disciplines. Disons même le Tao, plus largement.
L’univers est-il un chaos ou quelque chose de soigneusement ordonné?
Du peu de connaissance que j’ai en physique, je retiens qu’il y a et de l’ordre et du chaos, juxtaposés, et intriqués.
Comment aimerais-tu en finir?
Je ne vois pas comment « on » peut « aimer » en finir. On ne peut pas mourir. On meurt. La mort, n’a rien à voir avec la possibilité, encore moins avec l’amour.
Ton plus beau souvenir d’extase?
Le réveil, à 17 ans, seul, en pleine nuit, la fenêtre ouverte, et le vent soufflant fort dans toute la pièce comme s’il avait chassé tous les amis, entre qui je m’étais endormi, soucieux d’une forte fièvre qui m’avait affaibli. C’était dans un dortoir collectif de Skopje, Macédoine, où vivaient étudiants de provinces et réfugiés. Malade et hallucinatoire, submergé justement par ma mémoire qui faisait affluer devant mon front les images de tous les âges de ma vie, dans un flot ininterrompu pareil à la folie, recroquevillé sur un lit et serrant mes dents dans la chair d’une pomme, une jeune femme ne cessait de me répéter, avant que je me soigne dans le sommeil, que désormais je saurais distinguer le bien du mal. La fièvre m’ayant emporté dans le sommeil, je rêvai alors le plus puissant des rêves où je volais, sur un tapis, par dessus les continents, leurs villes et paysages, leurs peuples et leurs arbres, les mers, les océans jusqu’à la pointe orientale du japon où le tapis me versais au-dessus d’une terrasse avancée sur la mer ensoleillée, dans une baignoire de marbre et de lait, où des jeunes femmes en kimono me lavaient.
De quelle couleur est la lumière?
Du peu de connaissance que j’ai de la physique je retiens que le spectre a 7 couleurs, celles de l’arc-en-ciel. Puis d’un point de vue plus empirique la lumière est la condition de possibilité de la couleur : donc elle est de toutes les couleurs possibles avec leur variation : la lumière EST la couleur.
Préfères-tu qu’on te coupe les bras ou qu’on t’arrache la langue?
Tu veux dire, en situation de torture? Je n’ose pas imaginer, bien que j’ai vécu à 14 ans une intervention médicale (sans anesthésie) dans un poste avancé d’un pays pauvre, en imaginant, pour supporter la douleur des instruments dans la chair, que j’étais en train d’être torturé. C’est comme ça que je me donnais du courage. Mais quitte à être dans l’abstraction, j’aimerais garder ma langue. Je ne supporterais pas de vivre sans le plaisir des glaces au citron.
Saurais-tu mourir pour tes idées s’il le fallait?
« Mes idées » : ça dépend lesquelles : pour l’idée de la parité entre les sexes au conseil d’administration d’EDF ou à la tête d’Interpole (comme c’est le cas depuis Valls). Non. Par ailleurs je n’ai pas le malheur d’avoir pareille idée pour laquelle personne, par bonheur, ne mourra jamais, et pour laquelle d’ailleurs personne n’a jamais vécu.
Mais si l’idée, et le sentiment, de la liberté était mis en péril en moi, dans une situation qui me forcerait à vivre asservi ou mourir. Alors il faudrait que je meurs. A ce titre j’ai une admiration considérable pour les révolutionnaires morts sur la place de Kiev, pour leur courage. Cette révolution est l’évènement le plus colossal à quoi il m’a été donné d’assister de ma vie d’adulte.
La différence entre un fantasme et un rêve?
Le sommeil.
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